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Les SES au Grand Air

Un blog de ressources pour les sciences économiques et sociales

Les inégalités économiques au prisme du rapport interdécile...

Les inégalités économiques au prisme du rapport interdécile...

Alors que la question des inégalités économiques demeure centrale dans une société française marquée par la dualisation du marché du travail, la précarisation des travailleurs et la persistance d’un chômage de masse, l’observatoire des inégalités publie un document extrait d’une enquête menée par l’INSEE au début de l’année 2016. Ce document est intéressant à plus d’un titre car il met en évidence deux fractures sociales qui se jouent actuellement en France.

La première fracture concerne le niveau de salaire par décile : on observe ainsi que les 10% des salariés les plus pauvres du secteur privé et semi-public, y compris les bénéficiaires de contrats aidés, touchent un salaire mensuel net équivalent temps plein de 1200 euros constants. A l’autre extrémité de l’échelle sociale, on remarque que les 10% les plus riches ont un niveau de salaire trois fois plus élevé, qui s’élève à 3544 euros. Il est intéressant de noter que le niveau de salaire médian est environ 1,5 fois plus élevé que celui des 10 % les plus pauvres, tandis qu’il est deux fois inférieur à celui des 10% les plus riches ; cela montre que les écarts de niveau de salaire sont plus restreints dans les 50% de la population la moins riche alors qu’ils ont tendance à s’accroître dans la moitié la plus riche de la population. Ce constat est d’autant plus frappant si l’on considère le centile le plus riche de la population enquêtée ; on y voit que le niveau de salaire atteint 8061 euros par mois, soit un écart de 6861 euros par rapport à celui des 10% les plus pauvres. Ceci démontre que les inégalités peuvent se creuser « par le haut », le rapport interdécile du niveau de salaire des 1% les plus riches comparé à celui des 5% les plus riches étant quasiment de 2 (8061 euros contre 4526 euros). Autrement dit, le rapport des niveaux de salaire entre les 5% et les 1% les plus riches est quasiment équivalent à celui entre le niveau de salaire médian et celui des 10% les plus riches. La dispersion de salaire est donc aussi grande dans la moitié de population la plus riche que dans les 5% les plus riches de la population, laissant entrevoir que les écarts de niveau de salaire en France s’expliquent moins par des inégalités touchant les premiers déciles que par celles se manifestant dans les déciles les plus aisés.

La deuxième fracture mise en exergue par le document relève de la question des inégalités liées au sexe des individus. En effet, on note que quel que soit le décile considéré, le niveau de salaire des femmes apparaît moins élevé que celui des hommes. De plus, il est frappant de constater que plus on s’élève dans la hiérarchie des niveaux de vie, plus l’écart entre le salaire des hommes et celui des femmes tend à augmenter : dans les 10% les plus pauvres de la population, on note ainsi que les femmes ont un niveau de salaire environ 1,1 fois inférieur à celui des hommes. Le rapport passe à 1,16 pour le salaire médian, bondit à 1,3 pour les 10% les plus riches et finit à 1,5 pour les 1% les plus riches de la population enquêtée. Nonobstant, on peut remarquer que les inégalités de salaire dans la population féminine sont moins élevées que dans l’ensemble de la population : les 10% des femmes les plus riches ont un niveau de salaire 2,6 fois plus élevé que les 10% des femmes les moins riches. On observe néanmoins que ce rapport passe du simple au double si l’on considère le centile supérieur de la population féminine par rapport aux 10% les plus pauvres, démontrant là encore une forte dispersion des salaires au sein du décile supérieur. Enfin, il faut souligner que si les hommes ont un niveau de salaire supérieur à celui des femmes quel que soit le décile considéré, c’est aussi eux qui doivent supporter le niveau d’inégalité le plus fort entre les plus riches et les plus pauvres : le rapport interdécile entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres s’élève ainsi à 3,1, alors que le niveau de salaire du centile supérieur est 7,4 fois plus élevé que celui du décile le plus bas.

Ce document est donc instructif car il permet de montrer la multi-dimensionnalité des inégalités économiques, selon le niveau de vie d’une part et selon le sexe d’autre part. On y voit que les inégalités sont importantes entre le haut et le bas de la distribution des niveaux de vie, et qu’elles ont tendance à s’accentuer à mesure que l’on grimpe dans les déciles. On y remarque enfin une inégalité entre hommes et femmes très marquée et généralisée, qui a pour corolaire que les inégalités de niveau de salaire entre femmes sont (un peu) moins élevées que celles qui apparaissent chez les hommes.

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